Pas de message depuis mai, ce blog part à la déroute, c'est un fait. Pourtant, je suis loin de n'avoir rien foutu depuis mai. D'abord, mon podcast,
Kultur Breakdown, me prend de plus en plus de temps, ensuite, j'ai enchainé sur une (nouvelle) période de boulot à Ecrans/Libé en août dernier.
Et malgré ça, j'ai quand même eu le temps de participer à un autre podcast. Courant juillet,
Poligeek a invité les animateurs de différents podcasts pour un
numéro spécial avec plusieurs chroniques pour parler politique. Du coup, j'en ai profité pour traiter de la politique pour les séries TV, et comme mon inspiration est décidément bien à la baisse en ce moment, j'en profite pour recycler ma chronique et vous la faire lire. Parce que oui, aussi aberrant que ça puisse paraître, certains préfèrent encore lire une chronique que se taper deux heures d'émission. Il paraît... ou alors c'est juste une excuse minable pour alimenter ces pages à moindres frais.
J'aurais pu traiter du système constitutionnel de la République puis de l'Empire de Star Wars, et essayer ainsi d'expliquer pourquoi j'aime la prélogie, mais le sujet est plus juridique que politique et le dossier finalement entièrement pompé sur un article d'Alexis Frank, maitre de conférence de droit constitutionnel à Assas, que vous pouvez retrouver
sur son blog.
Finalement j'ai donc décidé de lier plusieurs de mes passions dans cette chronique. Je vais tenter d'aborder les diverses formes de la représentation politique dans les séries TV.
Personnages de maire, de gouverneur, de roi, de président, de sénateur, d'empereur, de pape ou même de conseiller, l'homme politique est omniprésent dans une série TV qui cherche à raconter une histoire ancrée dans un lieu précis. Le personnage politique va permettre de comprendre le système dans lequel évoluent les personnage. Parfois, comme le maire dans Buffy, ou les candidats aux élections municipales dans Sex and The City ou Desperate Housewives (je vous rassure, les bonnes références viendront après), parfois donc, le politique n'a qu'un rôle anecdotique : il est maire comme il pourrait être dentiste. Sa fonction d'homme politique n'est qu'un trait de sa personnalité qui permet de manifester son charisme et son pouvoir. D'ailleurs, dans ces rôles-ci, on ignore souvent le bord du personnage en question.
Un cas où l'homme politique prend davantage de place encore, au sein de la série TV, est la série historique. On le sait, l'histoire est toujours racontée par les vainqueurs, par ceux qui gouvernent, et est également centrée sur les gouvernements, les rois, les empereurs de l'époque. Quand on pense à la république romaine, on pense à César. Lorsqu'on évoque la révolution française, c'est Louis XVI qui vient en tête. Pour des raisons pratiques évidentes, les séries historiques prennent souvent le point de vue du politique. Que ce soit dans Rome, qui met en scène les affrontements politiques et militaires entre Pompée et César, puis Octave et Marc Antoine, ou dans les Borgias (diffusée cette année sur Showtime), les grands pans de l'histoire sont toujours contés du point de vue du politique, a fortiori si la série, comme dans Les Borgias, Les Tudors ou Les Kennedys est destinée à raconter l'histoire d'une dynastie. Même si le rôle politique reste présent, on est plus proche de saga familiale, souvent ancrée de mystères, de trahisons, de complots, puisque ce sont ces ingrédients qui font le sel de l'intrigue. On imaginerait mal une série sur Louis XII, alias « le père du peuple » (1498-1515).
L'idéal pour parler de la politique en dehors des grandes sagas historiques reste la fiction. Bien sûr, on peut partir dans le pur fantastique comme dans Game of Thrones ou dans Kaamelott mais l'exercice conserve quelques limites. Ainsi, si Game of Throne est une série résolument politique, traitant des méandres du pouvoir, de la guerre des chefs, de complots ou de putsch, elle ne prend le point de vue que des puissants sans qu'on en sache davantage sur le régime en place dans le royaume de Westeros. On est plus sur un aspect institutionnel que politique. Le régime semble ainsi être à la botte du roi des sept couronnes même s'il laisse la Main du roi (son premier ministre) gouverner réellement. La présence de différents royaumes au sein de Westeros semble indiquer qu'il s'agit d'un régime fédéral. On apprend même certaines règles qui concernent les Dothrakis, pourtant réputés barbares, comme, par exemple, le fait que le roi ne puisse rester au pouvoir s'il est incapable de monter à cheval. Du côté de Kaamelott, on en apprend également beaucoup sur le système institutionnel. Là aussi, il s'agit d'un royaume fédéral, le royaume de Loggre, avec tous les complots inhérents à une jeune fédération. Toujours sur le plan institutionnel, la saison 5 nous en apprend énormément sur les règles concernant le pouvoir en lui même. On a par exemple un système de régence, le fait que les femmes ne puissent pas accéder au pouvoir ou certaines règles plus complexes comme des coutumes (échange de femme de chevalier en pays de Vanne). Mais là où Kaamelott innonve réellement par rapport à Game of Thrones c'est sur les idées politiques véhiculées. On a beaucoup de thèmes sociétaux qui sont traités dans la série comme l'esclavage, la polygamie, la peine de mort ou la torture. On a également régulièrement droit à des manifestations de paysans qui viennent se plaindre sans trop savoir pourquoi. Encore plus politique, la série pourtant apparemment comique, n'hésite pas à situer certaines de ses scènes à la table ronde où sont, certes, racontées les quêtes des chevaliers, mais où se tiennent aussi les conseils de guerre et les décisions quant à l'armement, à la défense. Une mise en scène qui nous amène réellement au coeur du pouvoir politique, nous faisant ainsi participer à ces discussions. Cette entrée au sein des décisions politiques du gouvernement est finalement assez rare à la télévision.
Pourtant, The West Wing en a fait sa spécialité. Ceux qui écoutent Kultur Breakdown le savent, je suis un fan inconditionnel d'Aaron Sorkin et particulièrement de The West Wing, difficile pour moi de ne pas l'aborder ce soir. A vrai dire, si j'ai préparé ce sujet précis c'est bien pour en reparler une fois de plus. La série est contemporaine à sa diffusion et racontait les coulisses de l'administration du président américain Jed Bartlet. Là encore, il s'agit d'une série de fiction. Les personnages comme les situations, bien qu'inspirés de personnes et de faits réels sont fictifs. La série est probablement celle qui aura su le mieux parler de politique en traitant à la fois des partis politiques, des mécaniques institutionnelles, des campagnes et de sujets de société comme la vente d'armes aux États-Unis. On y côtoie au quotidien les cadres de l'aile Ouest de la maison blanche, conseillers politiques ou communicants, ainsi que le président des USA. Ici la politique n'est pas représentée par un personnage particulier, c'est la série toute entière qui est politique. Outre les aspects quotidiens de la politique américaine, la série propose de suivre le président Bartlet pendant ses deux mandats. On a donc une campagne qui dure une partie de la saison 4 et surtout qui sera l'enjeux principal de la dernière saison afin de découvrir qui sera le successeur du président Bartlet. Les choix politiques affirmés par la série sont très forts et on y retrouve toute la complexité du système américain avec le rôle majeur de la religion, le sujet épineux des armes, le terrorisme ou la guerre. C'est vraiment ma série favorite, et de très loin, donc je tenais absolument à profiter de mon passage dans l'émission pour souligner à quel point elle peut intéresser des auditeurs qui s'interessent à la fois aux séries et à la politique.
J'avais un dernier exemple de série politique en tête. The Wire, raconte la ville de Baltimore à travers différents angles que l'on découvre au fil des saisons. La saison 3 particulièrement est anglée sur les politiques à Baltimore. Même si la politique et notamment l'influence de la police face à la mairie dans le système américain est traitée tout au long de la série, c'est vraiment au cours de cette troisième saison que l'on découvre le rôle primordial des communautés pour se faire élire. C'est à travers le prisme de Tommi Carcetti, candidat démocrate à la mairie que l'on découvre tout ça, ainsi que via le sénateur Clay Davis, politicien corrompu qui représente ce que Carcetti souhaite à tout prix faire disparaître de Baltimore. Bien plus sombre et réaliste que The West Wing, The Wire fait le constat cruel que rien ne peut changer, qu'une homme politique malgré la meilleure volonté du monde ne peut faire évoluer une ville si sombre et si profondément ancrée dans la misère. Là encore, la série est brillante et je vous incite à tous y jeter un coup d'oeil.
Bien évidemment cette chronique ne saurait être exhaustive et j'ai fait l'impasse sur de nombreuses autres séries comme Brothers and Sisters, Boardwalk Empire, The Good Wife, Commander in Chief, Reporters ou Spin City. Ceci par pur manque de temps et de culture personnelle, il faut bien l'avouer...